dimanche 13 mars 2011

Le consensus antichrétien dans les institutions publiques du Québec

Si vous pensez que le Québec est essentiellement devenu non religieux, détrompez-vous. Le laïcisme apparent n'est qu'un passage pour plusieurs. Le Québec n'est pas principalement devenu areligieux, mais antichrétien. Il a récupéré les symboles et le vocabulaire du christianisme (ex. amour, anges, partage, pardon, prière, ...) mais il en a altéré le sens jusqu'à s'en lessiver.


(mise à jour : lundi 12 mars 2012 | révision grammaticale 30 mai 2014 | texte revu et augmenté 31 janvier 2015 | révision mineure  mars 2016)

Pour mieux comprendre l'apparence d'un consensus antichrétien actuel au sein de nos institutions publiques au Québec et pourquoi les disciplines des religions philosophiques orientales ayant pour base la réincarnation ou la loi du karma (et autres du genre) ont inversement accès au milieu de l'éducation dès le primaire, ainsi qu'aux locaux des écoles publiques et autres institutions publiques pour la tenue de leurs activité, il faut saisir le portrait spirituel et religieux en reconstruction ici depuis la seconde moitié des années 1960.


Sur les origines de la branche spirituelle du lobby antichrétien...

Ce changement de croyances était déjà mesuré et prévisible par une enquête réalisée en 1990-1991, soit quelques années avant les consultations (ciblées, sur invitation seulement) sur la place de la religion à l'école, 1998-2000. Ce rejet conscient de l'un (christianisme, dans toutes ses déclinaisons) pour le remplacer par les "nouvelles" spiritualités et croyances philosophiques et religieuses est évidemment inacceptable et ne doit plus rester caché ou inconscient. La discrimination n'a rien de l'équité dont se drape le mouvement dans les médias complaisants et... parfois complices. 


C'est un principe connu en sciences humaines: éliminez une religion et elle est vite remplacée par une, ou un certain nombre d'autres formes de croyances, cultes ou spiritualités et philosophies. Pensez par exemple, à la forte popularité des sciences occultes (ex. spiritisme) dans les anciens systèmes politiques et économiques totalitaires antichrétiens des pays d'Europe de l'est. Au Québec, à la lumière d'une enquête réalisée en 1990-1991 par le Centre d'information sur les nouvelles religions (C.I.N.R.) avec l'aide du Groupe de recherche en sciences de la religion de l'Université Laval, le lecteur du rapport publié est mieux en mesure de comprendre pourquoi des techniques spirituelles et croyances orientales (...) et d'autres disciplines propres aux religions philosophiques ont accès aux écoles aux heures régulières de cours, ainsi qu'à la sphère de la santé physique et mentale subventionnée par nos taxes et impôts (fonction publique, locaux et plages horaires publics non disponibles aux conférenciers chrétiens ou à la prière, etc.).

UNE PARENTHÈSE : De 1990 à 2011 : des adeptes des spiritualités non chrétiennes, voire antichrétiennes, bien établis dans leur technique ou leur profession


Ceux qui étaient des étudiants du collégial ou des universitaires lors des questionnaires de 1990-1991, étaient majoritairement sur le marché du travail huit à dix ans plus tard, lors des consultations sur la place de la religion à l'école. Et ces même personnes sont, en 2011, soit 20 à 21 ans plus tard, des technologues ou professionnels bien établis dans leur travail, ce qui inclut évidemment nos institutions publiques. De la même manière, les personnes qui cumulaient 10 ans d'expérience en 1990-91 au moment de l'étude, sont aujourd'hui au sommet de leur carrière ou en voie de devenir des nouveaux retraités et possiblement des consultants du secteur public (ex. en éducation, santé, organisation du travail, etc.). Ce sont souvent des coachs, des chefs d'équipe, etc.


Pages liminaires d'un livre-référence pro-Nouvel Âge aux États-Unis, The Aquarian Conspiracy , de Marilyn Ferguson, paru en 1980, et en français en 1981 sous le titre : Les Enfants du Verseau : pour un nouveau paradigme. Le livre est reconnu pour avoir grandement contribué à l'expansion du Nouvel Âge en Occident.  Notez que cet exemplaire acheté dans une boutique de livres usagés porte en ses pages liminaires un auto-collant d'un ange (un des symboles récupérés du christianisme -approche syncrétiste) et une note de la personne offrant le livre à une autre débutant sa carrière ou une nouvelle carrière ou mission (notez les guillemets pourraient suggérer un deuxième sens). La note manuscrite du 29 avril 1994 porte la mention : Pour la "nouvelle" "carrière". J'illustre ici le lien entre les nouvelles spiritualités non chrétiennes (souvent refonte d'anciennes croyances), n'exigeant aucune conversion publique et la profession, incluant les fonctions au sein de nos institions publiques (écoles, santé, etc.). Il s'agit d'un phénomène ignoré, volontairement ou non par les médias, par les institutions publiques qui prétendent avoir séparé les croyances spirituelles et l'État. Approche non confrontée par des mouvements laïcistes.



Venons-en à l'étude du Centre d'information les nouvelles religions (C.I.N.R. ) menée en 1990-1991 par l'Université Laval au Québec

Le Nouvel Age en question. Couverture (crédits image : CINR et Éditions Paulines)

Le Nouvel Age en question. Endos de la couverture (crédits image : CINR et Éditions Paulines

Les résultats de l'étude de 1990-1991 ont fait l'objet du livre Le Nouvel Âge en question, publié aux Editions Paulines & Médiaspaul en 1992 (1).

Pour une définition simple, le Dictionnaire Hachette définit en ces termes le
«New Age      Mouvement de pensée né aux É.-U. vers 1970, qui repose sur l'idée de l'avènement d'un "âge nouveau" et met en oeuvre des croyances et des pratiques ésotériques» (New Age, Dictionnaire Hachette, 2004).
En fait, en plus d'autre part du rejet de l'institutionnalisme ou de la méfiance envers les institutions ou courants officiels, ceci en forme l'approche centrale ou commune d'époques cycliques qui suivraient la logique des 12 signes astrologiques. Selon un courant majeur de cette croyance spirituelle, l'Histoire ne serait pas linaire mais cyclique. Le monde passerait ou serait passé de l'ère du Poisson (christianisme) à l'ère du Verseau, dans un nouvel âge ou une nouveau paradigme, d'où le nom de "Nouvel âge" donné au phénomène. Cette logique va pourtant étrangement à contresens des dates des signes du zodiaque, où le Verseau ne suit pas le Poisson. On observe un consensus sur ces points:
  • le remplacement du christianisme allant comme suit: un rejet croissant des enseignements des voies chrétiennes, au fil du niveau d'engagement de l'individu (néophyte, initié et maîtres), le néophyte pouvant tolérer les contradictions et le maître ayant évacué consciemment les traces de la foi chrétienne, sans en rejeter toutefois tout le contenu, mais en se les appropriant (ex. un bouddhiste qui reprend des textes populaires de la Bible, disant que ce sont des valeurs bouddhistes).
  • + la promotion d'une nouvelle ère (spirituelle, sociale, ...)
  • + la forte tendance anti-institutionnaliste, Si le rejet est surtout celui du catholicisme, ces autres institutions ne sont pas exemptes de scepticisme accompagnant les nouvelles croyances ou croyances anciennes adoptées (ex. pouvoirs de chamans, des astres, des cristaux, etc.) : structures politiques, médicales et éducatives conventionnelles, etc. Au sujet du retour aux voies anciennes, le chercheur Richard Bergeron posait d'ailleurs la question : «Néo-archaïsme ou post-modernité?» (p. 77 et suiv.).
Mais, au-delà du consensus  sous ces aspects, le phénomène culturel et cultuel du Nouvel Âge (OU New Age), N.Â., est beaucoup plus complexe (2). 

UNE PARENTHÈSE : De 1990 à 2011 : des adeptes des spiritualités non chrétiennes, voire antichrétiennes, bien établis dans leur technique ou leur profession


Ceux qui étaient des étudiants du collégial ou des universitaires lors des questionnaires de 1990-1991, étaient majoritairement sur le marché du travail huit à dix ans plus tard, lors des consultations sur la place de la religion à l'école. Et ces même personnes sont, en 2011, soit 20 à 21 ans plus tard, des technologues ou professionnels bien établis dans leur travail, ce qui inclut évidemment nos institutions publiques. De la même manière, les personnes qui cumulaient 10 ans d'expérience en 1990-91 au moment de l'étude, sont aujourd'hui au sommet de leur carrière ou en voie de devenir des nouveaux retraités et possiblement des consultants du secteur public (ex. en éducation, santé, organisation du travail, etc.). Ce sont souvent des coachs, des chefs d'équipe, etc.



Portrait des croyances et pratiques du Nouvel âge (N.Â.) et croyances orientales au Québec, à la fin du 20e siècle qui vient de se terminer(enquête conjointe C.I.N.R.  et Université Laval, 1990-1991)


Le mouvement du Nouvel Âge s'oppose à l'institutionnalisme et se constitue selon un réseau aux contours tantôt  fluides, tantôt carrément flous. S'il est certainement philosophico-religieux (généralement sans dieux au sens habituel), il n'exige normalement pas de conversion publique, ni l'adhésion exclusive à une spiritualité. Par exemple, une même personne peut puiser à divers courants comme le chamanisme, le bouddhisme, l'hindouisme, la théosophie, la kabbale et les médecines chinoises traditionnelles. Cette approche est typique
- de l'ésotérisme (puiser à divers courants spirituels) et
- de la post-modernité. 

L'étude conjointe du Centre d'information sur les nouvelles religions (C.I.N.R.) et du Groupe de recherche en sciences de la religion de l'université Laval s'est concentrée sur la petite tradition (les voies suivies par le peuple, manière dont la religion est vécue) plutôt que sur la grande tradition (les voies expliquées par les spécialistes, initiés, maîtres) (p. 36), mais sans oublier de mentionner où ces derniers se positionnent sous certains aspects.

Les données démontrent que,

1- en 1990, 38% des étudiants du secondaire (4 sur 10), 45% au collégial (près de 1 sur 2) et 57%   dans les universités (près de 6 sur 10) démontraient un intérêt pour le Nouvel Âge (p. 11).

2- Globalement en 1990, 53 % des étudiants croyaient que Jésus a apporté "le même message" que d'autres figures comme Bouddha et Mahomet (p.15), ce qui est grandement erroné, mais permet de profiter de la popularité de Jésus et de réinterpréter certains éléments du christianisme pour les intégrer dans la nouvelle mouture. C'est l'approche nommée syncrétisme dans le jargon de l'étude des religions. 

3- Un sondage Gallup de la même année, montrait que 11 % des Américains, soit plus de 1 sur 10, croyaient au phénomène de channelling (une version nouvel âge du spiritisme); «transe durant laquelle un esprit assume temporairement le contrôle de votre corps» (p.10, parfois appelé canalisation).

4- L'intérêt pour les activités du groupe de disciplines ésotériques associées au N.Â. tend à augmenter avec le niveau d'instruction et il semble tendre à être 

«un phénomène féminin de haute scolarisation» (Le Nouvel Âge en questionp.30) 
[...] 
«En effet, l'intérêt porté au N.Â. augmente avec le niveau scolaire de nos échantillons.» (Même source, p. 34)

Mais cela ne peut être généralisé (appliqué à tout le phénomène). En validant la corrélation des données, il ressort que 

  • sous certains aspects, il n'y a aucune différence homme-femme significative vs certaines croyances, pratiques ou techniques, 
  • alors que pour certaines autres, ce sont tantôt l'homme, tantôt la femme qui sont plus attirés ou engagés.

Dans le tableau de droite de l'extrait ci-dessous (v. p. 25), 
  • C (au début de la catégorie) = un groupe de croyances (ex. CASTRE = croyances reliées à l'astrologie)
  •  (au début de la catégorie) = un groupe de pratiques (ex. PINITI = pratiques initiatiques du N.Â.)
Symboles et lettres que j'ai ajoutés au tableau de la page 25 en lisant le livre:
  • La cible = le pôle d'attraction contient les principales portes d'entrée au N. en 1991-1992 au Québec (aura, voyage astral, channeling, télékinésie, télépathie, réincarnation)
  • les 3 astérisques (*) = pratiques préférées des personnes intéressées au N.Â. 3 groupes : PCORPS (pratiques relatives aux guérisons corporelles), PINITI (pratiques initiatiques) et PEXPER (pratiques à un niveau avancé). Voir p. 25
  • N = Néophyte
  • I = Initié
  • M = Maître
  • et les symboles bien connus pour mâle, donc homme (cercle avec flèche à 2 heures) et femelle pour femme (cercle avec croix vers le bas), lesquels désignent dans mes annotations de la page 25, les 4 groupes où il y a des préférences plus marquées en fonction du sexe de la personne.
Les pages ci-dessous ont été extraites uniquement dans le but de donner un aperçu de l'étude et des catégories (groupes) de croyances et pratiques principales du temps. L'extrait diffusé ne devrait en rien nuire aux droits d'auteurs, bien au contraire, car cela peut même donner le goût à mes lecteurs de se procurer la publication, bien que le livre publié en 1992 pourrait être difficile à trouver. Mon but ici, avec des données qui datent, est de démontrer que déjà en 1990-1992, les croyances et pratiques ésotériques exerçaient un fort attrait, même chez les catholiques, et que quand les Québécois ont délaissé le catholicisme, ils n'ont pas pour autant cessé d'être engagés dans les croyances et pratiques autres, bien au contraire. C'est ce qu'a fait ressortir l'étude du CINR diffuées via les Éditions Paulines et Médiaspaul.
Le Nouvel Âge en question, p. 24-25 annotées au fil de la lecture. LÉGENDE voir en haut de l'image.
Le Nouvel Âge en question, p. 26-27 annotées au fil de la lecture.


Autrement dit, les pratiques du Nouvel Âge suscitaient davantage l'intérêt ou une attirance chez les personnes ayant une formation supérieure, entre autres selon la fréquentation de l'ancien Salon du Nouvel Âge visité pour les fins de l'enquête en 1991, dont le nom a été remplacé depuis par de nouveaux vocables (salon de l'ésotérisme, etc.), là comme partout ailleurs dans la société québécoise.

Vous remarquerez qu'au Québec, l'expression Nouvel Âge est disparue des "écrans radar" alors que le phénomène, la famille de spiritualités et philosophies qu'il désigne, a inversement pris de l'expansion.


5- Le pôle d'attraction exercé du N.Â. était constitué en 1990, de la grappe suivante de croyances: aura, voyage astral, channeling, télékinésie, télépathie et réincarnation (groupe nommé CTEKNO aux fins de l'étude). Par ces portes d'entrées préférées, on accédait aux autres croyances. En fait, l'une des pierres de fondation du Nouvel Âge est la réincarnation (p. 45):
«Cet itinéraire dont l'homme est l'unique artisan, se fait sous la loi du Karma et de la réincarnation» (p.71). 
La loi du karma est en quelque sorte perçu comme une loi spirituelle universelle selon la croyance au Québec.

6- Avant l'étude de 1990-1991, on pouvait penser que la croyance dans la réincarnation était un phénomène marginal au Québec. Voici des chiffres surprenants:
«Le Groupe de Recherche sur les Croyances au Québec de l'Université Laval a montré que l'astrologie, la réincarnation et les extra-terrestres cohabitent avec Dieu, les anges et les saints (...) On peut dire aujourd'hui [étude de 1990-1991] qu'un québécois sur trois croit en la réincarnation, qu'un peu plus croient aux extraterrestres et que trois personnes sur quatre croient aux phénomènes paranormaux...» (p.57)
Et si le vocable Nouvel Âge est disparu des médias, probablement en raison d'un exercice de marketing en réaction à la connotation négative qu'il véhiculait à la fin du 20e siècle au Québec, le N. a fait du chemin depuis. On ne parle plus en 2015, de nouvelles religions et croyances regroupées sous le Nouvel Âge, mais de spiritualités. Cela n'a pu se produire qu'avec la collaboration des médias dont les membres font aussi partie de ces nouvelles spiritualités et religions.

7- Porte d'entrée: on adhère au N.Â. par une transition en douceur (qui peut co-exister au départ avec le catholicisme ou le protestantisme traditionnels) par exemple : par une thérapie (ex. massage de rééquilibrage énergétique, une approche de santé) ou une technique (ex. énergie du cristal, channelling ou canalisation = spiritisme moderne, relaxation), ou par un livre à cette fin (p.66-67). Le christianisme conscient, toléré au début des processus initiatiques, tend à être évacué au rythme de la démarche, sinon, partiellement récupéré par syncrétisme, ex. les anges qui changent de rôle chez les adeptes plus avancés pour devenir des entités interrogées pour délivrer un message.

8- Dieu y reçoit une interprétation nouvel âge, tout comme des pratiques comme prier Jésus-Christ. Le N.Â. récupère ainsi souvent à son compte des références et symboles religieux qui l'ont précédé mais en en transformant le sens (néologisme), par exemple, des termes réinterprétés comme  dieu, divin, esprit, âme, conscience, délivrance, prière, Christ ou christ et christique, prophète, anges, bien, mal, ...
Il serait erroné de comprendre ces mots dans le même sens que celui d'où ils ont été empruntés, car le N.Â., leur donne un sens nouveau . Une chose, un rite, devient autre chose dans les nouvelles croyances. Par exemple, par syncrétisme, au Moyen-Âge, le culte des saints a remplacé le culte des divinités servies jusque là, dans la voie qu'est devenu le catholicisme. De la même manière, les symboles communs aux voies issues d'origines chrétiennes diverses (ex. la colombe, les anges, le titre de christ, etc.) sont récupérés pour devenir autre chose. Les paroles de Jésus sont citées pour défendre le bouddhisme, généralement hors de leur contexte et même en dissonance d'avec le bouddhisme avancé (donc, un syncrétisme de transition).

9- Enfin, le N.Â. était, en 1990-91 au Québec, fortement caractérisé par l'individualisme, chacun se construisant une croyance sur mesure (p.43, 44, 46, 50, 55, 58, 59) et par le rejet progressif de l'institutionnalisme pour ceux qui y cheminent, particulièrement le rejet du catholicisme (p.47).

Les nouvelles spiritualités, tout comme le laïcisme (laïcité élevée en idéologie organisée politiquement) tendent à se regrouper contre toute forme de christianisme avoué


Dans le Québec de 1990, les nouvelles religions philosophiques, présentées sous la forme de gnoses (3), d'animismes (4) ou autres, pouvaient coexister relativement facilement avec certaines formes héritées du christianisme, en raison du relatif faible nombre d'initiés ayant dépassé le niveau de néophyte; les premiers échelons exploratoires de ces croyances. Le Québec était décalé d'au moins une bonne décennie sur les États-Unis, par exemple, où les vedettes (stars) ne craignaient pas de s'associer publiquement au New Age qui était pratiquement une marque de commerce. Par exemple, Shirley MacLaine (Out On A Limb, 1987) et Oprah Winfrey (dans son célèbre talk show) ne craignaient pas d'y être associées.

Durant la décennie 1990-1999 au Québec selon Statistique Canada (cité dans le rapport Proulx, dans la réforme sur l'éducation),

  • 86,2 % de la population québécoise se déclarait catholique (près de 9 sur 10) 
  • et 5,24% (soit 357,030 Québécois sur 6,810,300 OU 1 Québécois sur 19) de foi protestante; 
  • soit plus de 91,3% combiné, pour les 2 principales formes issues du christianisme.
C'était bien-sûr, sans compter les contradictions chez ces mêmes individus. Ceci contraste évidemment avec les statistiques sur les croyances véritables vues précédemment (une pierre angulaire étant la croyance dans la réincarnation pour 1/3 des Québécois en 1990). Cette opposition entre les croyances véritables et l'identification officielle dans les recensements et sondages confirme certaines réalités, notamment:

  • qu'une étude permet mieux qu'un simple sondage, d'identifier les idées et convictions dominantes
  • soit le peu de connaissance des points centraux communs à tout le christianisme (ex. incarnation de la divinité, une seule vie est donnée à l'homme, etc.) ou le peu de cas que les personnes en faisaient,
  • l'ignorance de l'effet sur la culture (ex. sur les valeurs) de semblables contradictions, même non conscientes ou l'étrange illogisme de l'adhésion à des croyances opposées,
  • soit plus probablement, le désir de certains adeptes ou initiés d'agir dans l'ombre pour mieux promouvoir leurs choix spirituels de l'intérieur des institutions publiques du Québec, y inclus dans la sphère politique, dans les médias et dans les organismes ou actes professionnels subventionnés par l'État (ex. santé).
Ceci résultait déjà, par exemple en 1990, en une transformation sociale qui accorde plus d'importance à l'individu qu'à la collectivité (p.58). Cela est typique entre autres, de la croyance dans le Karma; une loi spirituelle qui régit les pratiques comme le yoga, la méditation et d'autres disciplines, tout en impliquant les réincarnations dans l'hindouisme ou les renaissances du bouddhisme. Par exemple, en Inde, c'est de ta faute si tu es pauvre ou malade (d'où les castes hindoues), là où ces spiritualités sont appliquées à la vie (logique implacable du karma). En ces endroits, la réincarnation n'est pas quelque chose que l'on accueille avec joie, comme on le fait au Québec, mais une fatalité que l'on préférerait ne pas devoir affronter.

L'étude conjointe du Centre d'information sur les nouvelles religions (C.I.N.R.) et du Groupe de recherche en sciences de la religion de l'université Laval démontrait déjà la tendance du rejet du catholicisme par les adeptes des spiritualités du Nouvel Âge.

Les années ont démontré que si le Nouvel Âge coexistait  au départ avec le christianisme, les temps ont changé. Il faut comprendre que les gens voyaient moins les contradictions d'alors, tout comme ils ne voient pas actuellement les illogismes de leurs rejet de toute forme structurée de la foi chrétienne aujourd'hui (5). Par exemple, il est absurde de rejeter les notions de bien et de mal versus une conséquence qui transcende la vie et d'autre part, d'adhérer à la réincarnation dont le karma attribue des points d'aptitudes (ex. renaître homme dans la prospérité) ou d'inaptitude (ex. renaître femme dans une famille pauvre), pour les prochaines vies.

Et avec le temps, cette polarisation se fait au Québec en opposition non seulement à l'institution catholique, mais de là, s'étend au christianisme sous quelque forme qu'il se présente, d'où la progression de l'attitude contre les protestants qui sont très répandus hors-Québec, où il font aussi partie du paysage politique (ex. les «méchants» évangéliques qui ne sont en fait que les protestants contemporains issus de l'héritage historique, de la Réforme du 16e siècle, sous des conducteurs comme Martin Luther, Ulrich Zwingli, Jean Calvin, Menno Simons, etc.). Inversement et étrangement, les adhérents et les adeptes plus avancés dans une voie du Nouvel Âge (religions philosophiques et diverses croyances et pratiques ésotériques, animistes, gnostiques, théosophiques, spirites et autres semblables) sont souvent politisés et souvent très actifs et engagés dans leur milieu professionnel. Les domaines de la santé physique et mentale et de l'éducation (instruction publique) sont parmi les plus sous influence du N.Â., évidemment donc, jusque dans les institutions publiques. Regardez les sponsors (annonceurs) des magazines de psychologie pour vous en convaincre.

Mais le succès actuel des disciplines des "nouvelles" religions philosophiques (souvent une refonte d'anciennes croyances ou anciens cultes) dans nos institutions publiques ne pourrait s'expliquer sans un minimum de complicité des mouvements laïcistes, ainsique que de certaines autorités politiques et de l'élite non élue.


À cet égard, un directeur d'école partageait avec un citoyen très politisé, qu'étrangement, des gens de l'élite politique louaient directement des locaux pour des activités du genre dans son école, sans passer par le chemin habituel et sans que la direction aient à donner son accord.

Il existe plusieurs signes d'une certaine forme de consensus antichrétien au Québec, comme il en a existé en présence de princes ou politiciens et chefs religieux rivaux en en contact avec la foi chrétienne naissante:
- Pilate et Hérode, dans l'empire Romain devinrent amis, d'adversaires qu'ils étaient, et ce en raison de la crucifixion de Jésus (Évangile selon Luc, chap. 23);
- Les nouvelles églises chrétiennes implantées on vu, dès la naissance du christianisme (dans le prolongement du Judaïsme), de telles associations entre les pouvoirs politiques, économiques, judiciaires, comme en fait foi cette citation extraite d'une prière prononcée au 1er siècle ap. J.-C., dans le contexte de la persécution des premiers chrétiens:
«Lorsqu’ils l’eurent entendu, ils élevèrent à Dieu la voix tous ensemble, et dirent : "Seigneur, toi qui as fait le ciel, la terre, la mer, et tout ce qui s’y trouve, c’est toi qui as dit par le Saint-Esprit, par la bouche de notre père, ton serviteur David :

Pourquoi ce tumulte parmi les nations, 
Et ces vaines pensées parmi les peuples ? 
Les rois de la terre se sont soulevés, 
Et les princes se sont ligués 
Contre le Seigneur et contre son Oint

«En effet, contre ton saint serviteur Jésus, que tu as oint, Hérode et Ponce Pilate se sont ligués dans cette ville avec les nations et avec les peuples d’Israël, pour faire tout ce que ta main et ton conseil avaient arrêté d’avance [référence à la crucifixion de Jésus]. Et maintenant, Seigneur, vois leurs menaces, et donne à tes serviteurs d’annoncer ta parole avec une pleine assurance" (...)» (extrait du livre des Actes, chap. 4).

Le jeu des athées et agnostiques pour sortir les chrétiens de la vie publique


Quant aux athées et agnostiques militants, ils profitent de cet état de la popularité des diverses croyances, pour évacuer le christianisme de la société publique, tout en favorisant les autres croyances et pratiques par un silence complice.

Dans les faits, il existe même une confusion volontaire sur le fait que les diverses pseudo-nouvelles croyances seraient ou non, de véritables religions (croyances spirituelles ou philosophico-religieuses). Cette ambiguïté est maintenue du fait de notre conception du religieux (monothéisme avec culte évident), mais aussi
  • de notre ignorance des cultes et croyances non déistes (religions et philosophies religieuses avec des divinités différentes - exemple: divinité de la nature, concepts différents de l'Au-delà ou de l'éternité ou de la nature humaine, etc.),
  • OU que l'invocation de divinités (ex. dans les mantras du yoga, ou encore des divinités appelés souvent "énergies", "entités", ...) est mal connue de la population en général ou des nouveaux adhérents en début de processus initiatique. Par la suite, ces personnes pensent toutes de la même façon et croient pour la plupart que cette pensée leur est venue d'elle-même, sans aucun processus initiatique plus ou moins conscient. Elles ignorent aussi que cette conversion est souvent même aidée de la consommation de certaines drogues influençant directement l'expérience ou la prédisposition à certaines expériences. Il suffit de se rappeler la montée de la consommation des drogues autres que l'acool, dans les années 1960-70 (ex. cannabis, LSD), accompagnée des voyages en Orient ou du réinvestissement des anciens cultes jusque là en déclin. 
C'est ainsi qu'alors que le discours officiel sur les sites web gouvernementaux tend à affirmer par exemple, que le bouddhisme ne fait pas de prosélytisme (convertis), les livres et articles pour nous conduire à ses pratiques sont légion. Et qui connaît un tant soi peu l'Histoire, sait que cette religion majeure s'est imposée au gré des conquêtes armées (religion de l'empereur, par exemple). Sans prosélytisme actif, nous n'aurions pas des kiosques à journaux et magazines, les rayons de librairies, débordant d'écrits pour nous convaincre du "bien fondé" de l'approche orientale, ni un nombre croissant d'occidentaux s'identifiant au bouddhisme dans les recensements nationaux.

Ceci est évidemment inacceptable et ne doit plus rester caché et méconnu.

(texte à l'origine préparé par Gilles B. en vue de la proposition d'une chronique au rédacteur en chef d'un journal régional, 12 août 1999, entièrement refondu les 13, 14 et 21 mars 2011. Le rédacteur m'a proposé 400 caractères par publication du journal et dans mon orgueil, j'ai refusé, car toutes les autres chroniques étaient plus longues. Je m'en mors les doigts quand j'y repense...)

KutLess - Shut Me Out (vidéo)

 
Autre texte :

_______________
1.  BERGERON, Richard et autres. Le Nouvel Âge en question. CINR et Éditions Paulines & Médiaspaul. 1992, 192 pages.

2.  Précisons que le Nouvel Âge (N.Â.) constitue une approche englobante, en marge ou en opposition de l'institutionnalisme (ex. même l'institutionnalisme en santé, en pharmacologie,...) mais plus particulièrement en marge du christianisme. Le mouvement constitue un réseau en évolution, des croyances ou pratiques souvent anciennes; plusieurs ayant précédé la modernité et l'ère industrielle : les anciennes gnoses, l'astrologie, la voyance, l'aura, le voyage astral, le channeling (un nouveau nom pour désigner le spiritisme de fin du 20è siècle), les réincarnations et le karma (définition variable selon le bouddhisme, l'hindouisme ou la théosophie). Il regroupe aussi des approches plus techniques comme la croyance dans les extra-terrestres salvateurs ou plus "psychologiques" comme  la pensée positive créatrice et l'interprétation des rêves dans un sens ésotérique. Le Nouvel Âge (New Age) puise abondamment aux religions orientales dans leurs formes philosophiques plutôt qu'institutionnalisées, comme une sélection (extraction d'éléments) de croyances du bouddhisme, de l'hindouisme, du taoïsme, du shintoïsme et de pratiques, disciplines ou techniques associées comme le zen, la méditation, le yoga, le taï chi, les arts orientaux initiatiques et plusieurs autres. L'approche nouvel âge s'étend aussi aux sphères privilégiées de la santé (ex. médecines parallèles, massages et re-balancements énergétiques, pouvoirs des cristaux) et à l'environnement, où la Terre a une volonté et une identité propre; Gaïa, la déesse Terre qui punit consciemment les humains par des événements comme les récents cataclysmes naturels (incluant les tremblements de terre et tsunamis). Fortement teinté d'ésotérisme, le N.Â. puise à diverses croyances.

3. Gnoses : délivrance de l'individu par l'illumination ou élévation du niveau de conscience. Voici une illustration pour mieux comprendre. Parmi les anciennes gnoses, on comptait par exemple l'alchimie, dont les formules étaient un trompe-l’œil utilisé par la société secrète (approche initiatique progressive). La pierre changeant les métaux en or était "philosophale" (de philosophie) et le changement des matériaux (ex. la quête de changer les métaux en or pur) référait en réalité au changement vécu ou à parcourir par l'initié. Le Nouvel Âge fraye beaucoup avec le gnosticisme, d'où la grande popularité des anciennes traditions philosophico-religieuses.

4. Animismes : la matière est sacrée et porteuse de pouvoirs transmissibles, d'énergies magiques, d'une personnalité. Les chamans ont la cote en ces années.

5. Comme illogisme, on peut mentionner le mépris de la notion chrétienne du péché (oeuvre mauvaise ou même inversement, l'inaction ou non-oeuvre) curieusement remplacée par l'adhésion au concept des œuvres mauvaises qui génèrent un mauvais karma individuel chez les personnes et la réincarnation possibles des centaines, milliers ou millions de fois, (dépendant de la tradition) et pouvant être écourtée par des pratiques comme le yoga et la méditation.
    Une contradiction majeure avec la foi chrétienne est la réincarnation. Celle-ci est non réconciliable à l'enseignement chrétien de la vie terrestre unique, avant l'Au-delà. De plus, le New Age n'a pas de dogme du bien et du mal (sauf les chrétiens à bannir de la vie publique) ce qui explique en partie sa grande popularité. Le bien et le mal sont en fait des forces qui peuvent même s'équilibrer en harmonie, comme les forces positives et négatives de la matière. Ceci est évidemment une métaphore ne respectant pas les règles du lien entre l'exemple utilisé et la réalité. Une chose peut être vraie dans le monde matériel (ex. les charges électriques) sans l'être pour autant dans la sphère spirituelle ou morale. De la même manière, une pratique peut "fonctionner" sans pour autant être bonne pour l'humain.