vendredi 1 avril 2011

Élections, maisons de sondages et pieux mensonges

C'est un fait connu que lors des dernières élections fédérales, les sondages trop favorables au parti Conservateur ont induit un renversement d'un nombre significatif des intentions de votes pour faire élire un gouvernement minoritaire. C'est l'attitude habituelle du Québec indécis en qui il y a toujours le «oui» et le «non»; «Je plonge, je plonge pas». Certains individus ou groupes ont donc suggéré au électeurs pro-Conservateurs de faire un pieux mensonge aux firmes de sondage et de dire qu'ils voteront Bloc Québecois ou Libéral.


Une radio privée de Québec a mentionné brièvement quelque part cette semaine qu'une suggestion était dans l'air pour éviter qu'à la dernière semaine de la période électorale, des citoyens de tendance conservatrice faible ou des indécis votent à la dernière minute dans le sens contraire des sondages pour s'assurer d'un gouvernement conservateur minoritaire. Il s'agirait de mentir lors des sondages, pour déjouer le biais (changement de comportement) ainsi introduit par la machine médiatique.

En effet, lors des dernières élections, les Conservateurs auraient vraisemblablement échappé la majorité en raison d'une avance un peu trop assurée en mi-course. Le résultat aurait été selon cette lecture des faits, que des électeurs du Québec, disposés à voter "à l'essai" pour faire élire le parti Conservateur du Canada, auraient fait volte-face et changé leur intention dans les derniers jours avant le scrutin, pour voter pour un autre parti en vue d'éviter l'élection d'un gouvernement Conservateur majoritaire.

Effets pervers des sondages durant les derniers jours avant les scrutins électoraux

L'idée soulève un point important: l'impact possiblement pervers des sondages lors des derniers jours avant les votes officiels. Comme un chercheur qui contaminerait ses recherches en modifiant l'environnement observé, les maisons de sondage modifieraient les comportements (ici, le vote) et contamineraient les données de la recherche.
Il est en effet logique de croire que devant la bonne précision des sondages à quelques jours d'une élection, il se fasse de tels exercices de "pondération" ou même de manipulation de l'intention électorale. Si c'est le cas, les sondages des plus ou moins 10 derniers jours avant le scrutin auraient un effet nettement pervers, allant même contre l'esprit de la démocratie canadienne et québécoise qui est de représenter le peuple et non de le censurer et le pondérer en modifiant l'environnement observé (approche scientifique inadéquate).

Un pieux mensonge


Serait-il éthique ou acceptable de mentir aux firmes de sondages à moins de dix jours ou une semaine des scrutins pour contrer la contamination introduite au processus par des sondages? Si l'on considère que les maisons de sondages ne représentent pas une autorité établie et reconnue, mais des consultants pour des fins de marketing, on peut répondre que oui, il serait acceptable de fournir de fausses informations avant l'élection, d'autant plus que dans nos démocraties le vote est par définition secret, ceci pour contrer les manipulations ou le chantage (marchandage des votes, pénalités pour avoir voté du mauvais côté, etc.). Vous n'êtes pas obligés de donner une information confidentielle (vote secret). Par contre, si une firme vous rémunérait pour connaître votre opinion et que vous acceptiez les conditions, alors on pourrait dire que le mensonge serait une violation du contrat qui vous unit.