dimanche 6 décembre 2015

Les deux procès du Dr Guy Turcotte annoncent-ils la fin du shopping des avis psychiatriques?

Le procès de Guy Turcotte (le chirurgien cardiologue qui a tué ses deux jeunes enfants) et l'appel entendu au Canada ont fait ressortir qu'un changement important, mais plutôt simple, s'impose pour le maintien de la confiance dans le système de justice canadien, lors du recours aux témoins-experts de la santé mentale pour crimes majeurs (ex. homicides).


Il a semblé subsister une très relative fiabilité, voire une faille dans le droit criminel au Canada, lors du recours au témoins-experts en matière de psychologie/psychiatrie, dans le contexte d'une approche-client entretenue par les intervenants:
  • procureurs de la couronne
  • procureurs de la défense
  • certains experts-conseils de la santé mentale en matière de droit


Sur invitation du journal québécois La PRESSE / Le Soleil, 59 experts ont accepté de donner leur avis sur une possible déconnexion de la réalité associée à un «trouble de l'adaptation avec humeur anxio-dépressive» (1). La grande majorité des experts-conseils répondants (99%) voyaient extrêmement improbable (53%) ou impossible (39%) ou sinon peut-être possible mais très rare (7%) que ce diagnostic puisse mener à une déconnexion de la réalité, au point d'assassiner ses deux bambins à coups de couteau sans réaliser ce qu'il faisait. 

C'est pourtant le jugement qui l'avait remporté au premier procès de Turcotte avec jurés.

Cela serait une énorme amélioration: que les deux ou trois experts entendus dans le cas de crimes graves (homicides) ne travaillent ni pour la couronne, ni pour la défense, mais pour la justice (le tribunal), tout en étant rémunérés par la défense et l'accusation. 

Il faudrait aussi reconnaître que la connaissance de la complexité du cerveau et des émotions n'est pas une science exacte.

Crédits images : La PRESSE / Le Soleil 20 nov. 2015 et 1er déc. 2015


le Dr Louis Morrissette fait partie de ces exceptions. Il a témoigné en faveur de Turcotte dans son premier procès. Il est apparu aussi dans d'autres causes de criminels célèbres, comme lors de la représentation pour libération de Karla Homolka; une autre histoire d'horreur. Avec son mari complice et tueur en série Paul Bernardo, elle avait participé à la séquestration, au viol et aux meurtres de jeunes filles, dont sa propre sœur Tamy, âgée de 15 ans. Libérée après une peine négociée, elle vivait libre en 2012 en Guadeloupe sous un autre nom, et avait donné naissance à des enfants.

Il est clair que le clientélisme psychiatrique en matière de droit criminel doit cesser: pourquoi alors la résistance chez les professionnels de la santé mentale? 


On comprend mal la réticence des experts-conseils en psychologie/psychiatrie, à mettre fin à ce «magasinage», comme il est pourtant exprimé dans l'article du journaliste Jean-François CLICHE:

«Si le magasinage d'experts dérange, voire scandalise les psychologues et les psychiatres, les juristes semblent beaucoup moins convaincus qu'il s'agit d'un problème. Et dans tous les cas, avertissent-ils, on aurait tort d'espérer une solution miracle...» (2)

Pourtant tout serait si simple sans cesser d'avoir recours aux avis d'experts-conseils en santé mentale


Pensez-y. une simple modification du mode de paiement des professionnels pourrait avoir pour effet que les deux ou trois experts entendus dans le cas de crimes graves (homicides) ne travaillent ni pour la couronne, ni pour la défense, mais pour la justice (le tribunal). Les frais seraient partagés entre la poursuite et la défense, mais tout cet aspect lié au clientélisme des experts et procureurs serait réglé. Le professionnel ne sachant pas s'il travaille pour la couronne ou la défense n'aurait pas grand intérêt à adapter l'incertitude à la situation et au payeur, ou en cas de deux diagnostics possibles, pas davantage de sentiment de de devoir retenir celui à l'avantage de son «client».

Mais ce serait trop simple et probablement que l'on cherchera des solutions compliquées.


AUTRES TEXTES:

Nouveau procès pour le Dr Guy TURCOTTE (nouveau JECKILL & HYDE)

(14 novembre 2013)
http://yapasdpresse.blogspot.ca/2013/11/nouveau-proces-pour-le-dr-guy-turcotte.html


Guy Turcotte et Valery Fabrikant: profil ressemblant

(vendredi 8 Juin 2012)


(5 Juin 2012)


Psychiatrie et Guy Turcotte : diagnostic à la carte

(18 mars 2012)

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1.  Jean-François CLICHE. Lumière sur le «magasinage» d'experts. La PRESSE / Le Soleil. 30 nov. 2015, mis à jour 1er décembre 2015.

2.  Même source