mardi 11 mai 2010

Maïs ou cannabis? Le lobby du cannabis contre-attaque

Il semble que l'élimination des interdits constitue, selon certains individus et groupes de pression, le moyen d'éliminer la criminalité... Vous voulez éliminer la criminalité? Rien de plus simple: éliminez les lois! Voilà en essence, leur raisonnement. Voyons quelques uns des arguments utilisés pour la promotion de la vente libre du "pot" (cannabis, marijuana). 
(Dernière modification : 12 mai 2010, 21h34)

(crédits photo : Sûreté du Québec)

1)  L'argument de l'impossible contrôle de la consommation

Les gens qui veulent se procurer des drogues le font déjà, dit-on, même si la vente et la consommation sont illégales. Sauf que, c'est la même chose avec un individu qui veut se trouver une arme de poing (revolver). Il lui suffit d'aller dans le "bon" quartier et de trouver un bar où se tiennent des revendeurs.

Jusqu'où ira la libéralisation des actes criminalisés? Il semble que dans notre société, l'enlèvement des interdits soit en voie de devenir le moyen de réduire la criminalité. Cela est sûrement commode statistiquement et donc, politiquement payant.

2)  L'argument des coûts reliés à la prohibition

Les coûts financiers reliés à la prohibition (enquêtes, police, tribunaux, application des peines) seraient récupérés, croient certains, en cas de libéralisation de la vente des drogues.

Cela demeure une théorie. Pensez seulement à la hausse des accidents de la route et de blessures ou décès, sans omettre les éventuels problèmes de santé mentale, de criminalité, ou autres. Le nombre de conducteurs qui prennent la route après avoir consommé des drogues, est déjà en hausse au Québec. Et l'argent est rarement une mesure valable de la justice et de l'équité, bien au contraire.

De plus, le phénomène de banalisation de l'usage des drogues, comme  dans le cas de l'acceptation sociale du suicide, agira comme une forme de renforcement positif de la consommation auprès des jeunes.

La véritable motivation de la criminalité

On dénote dans l'argument fondé sur les coûts actuels de la justice, un manque flagrant de compréhension de la réelle motivation qui attire des individus vers la criminalité ou à la fraude. Dans les faits, le criminel dépourvu de sa source de financement se demande aussitôt comment faire de l'argent rapidement et moyennant le moindre effort. Le plus d'argent, le plus vite possible, voilà sa déclaration de mission.

3) L'argument de la "nature" qui tend à combler le vide

Selon cet argument, l'absence d'un marché libre et légal pour les drogues crée le besoin comblé par le marché illégal.

Ne soyons pas naïfs. La disparition d'un moyen facile de faire de l'argent rapidement crée la demande et l'offre pour une pratique criminelle de remplacement. La criminalité ne s'effacera pas en éliminant les lois.


Mutations : la criminalité, comme un virus

On oublie volontairement que la perte de source de revenus créé par la libéralisation des drogues, affecterait aussi à son tour les criminels privés de leurs revenus faciles. Autrement dit, l'économie souterraine (contrebande) muterait, telle un virus. Cet argument selon lequel le vide crée l'offre, se trouve donc annulé par la nature même de la criminalité. La disparition d'un moyen facile de faire de l'argent rapidement crée la demande et l'offre pour une nouvelle pratique criminelle.

En réalité, les apparentes économies reliées à la justice et à l'application des lois, seront bientôt utilisées pour combattre de nouvelles activités criminelles qui se développeront inévitablement. On peut penser à la copie des drogues (avec les risques inhérents), la vente de drogues plus "hard" toujours prohibées, OU la contrebande de drogues sans taxes et moins chères au même titre que la contrebande de cigarettes, etc.

En appliquant cet argument de la nature et du vide dans toute sa logique, il faudrait régulièrement, selon les formes de criminalité en vogue dans une nouvelle génération donnée, enlever les interdits correspondants, dans le but de réduire le crime et sécuriser le public, ce qui est évidemment une absurdité et démontre bien que l'argument est en réalité, un sophisme séducteur.

Et, plus inquiétant encore, en matière de consommation des drogues, nous continuerions de voir l'apparition de trucs plus sales, vendus au marché noir. Les chimistes (et pseudo-chimistes) continueraient, comme c'est déjà le cas, de produire des molécules, sans égard au bonheur et à la santé à long terme des jeunes et moins jeunes, se foutant de leur santé et bien-être.

4) L'aspect "médical" OU le Docteur Cannabis

Le cannabis essaie d'obtenir son diplôme. Un éventuel usage médical élargi du cannabis, pour le soulagement de la douleur, risque d'influencer à tort, l'actuel débat. C'est de la poudre aux yeux pour parvenir, en quelques étapes faciles, au libre accès à la poudre au nez.

Le fait que certains chercheurs (commandités par qui?) prédisent ou construisent de toute pièce, un avenir thérapeutique (pharmacologique) et une image au cannabis, ne devrait pas influencer le débat actuel. Il s'agit ici, bien plus que de vendre des capsules sous ordonnance médicale. Il est question de consommation en vente libre à des fins ludiques (de loisirs).

Et même en cas d'effets thérapeutiques réels de certaines molécules, à efficacité comparable, un médicament ne devrait être prescrit que si ses effets secondaires sont moindres que ceux des produits homologués du marché qui ont fait leurs preuves.

Quel employeur voudrait que ses employés prennent leurs doses de cannabis au travail pour calmer des douleurs lombaires, des maux de tête, ou leurs souffrances existentielles ?

À mon entrée sur le marché du travail, des collègues ont consommé du cannabis durant certaines parties de leurs journées. Leur production, leur dextérité (précision) et leur jugement s'en sont trouvés immédiatement et directement affectés. Après deux ou trois jours de cette pratique, JE devais bientôt compenser pour leur perte de production, et ceci, sans aucune compensation salariale pour le surcroît de travail.

Les risques pour la santé

Dans un contexte de libre marché et de banalisation de la consommation de substances chimiques, il sera très facile pour un jeune de se voir proposée, une panoplie de produits et petites "pilules" et de baisser la garde progressivement. Mais qu'y aura-t-il effectivement dans cette camelote chimique?

Il est maintenant en plus confirmé par des recherches que la consommation de cannabis contribue à faire augmenter le nombre des psychoses, particulièrement chez les jeunes. Et, jusqu'à quel point un jeune de 13, 14 ou 16 ans peut-il vraiment évaluer les conséquences des drogues légales ou illégales sur son cerveau, son système nerveux, ses émotions et son caractère, sa motivation, etc. pour les décennies à venir? À cet âge, on se croit invulnérable et immortel.

Un étudiant que je connaissais personnellement consommait depuis quelques mois, sur une base hebdomadaire, des drogues comme le cannabis et le haschish (hasch, haschich). Un jour, il apprit une nouvelle décevante. Le weekend suivant, au retour d'un soir de consommation de ces drogues dites "douces", il pensa sérieusement au suicide, mais son arme de chasse n'était pas sur place. Le lendemain, il fut ébranlé de repenser du fait que l'impulsion suicidaire de la veille était totalement disproportionnée par la drogue "douce". La drogue consommée avait vraisemblablement agi comme un amplificateur émotionnel. Les émotions négatives seraient donc logiquement tout autant "amplifiées" que les autres.

Ainsi, en cas de problèmes comme la perte d'un emploi, d'une rupture amoureuse et d'autres revers de la vie semblables, il devient très facile d'imaginer l'impact d'une banalisation de la consommation des drogues, couplée à celle de la valorisation du suicide comme solution sociale acceptable à un problème.

5) L'argument du modèle d'assistance à la consommation : la "douce" piquerie d'État

Le modèle d'assistance à la consommation des drogues "dures" (ex. injection) demeure en réalité une assistance à l'autodestruction. Mourir dans une piquerie de l'État, aux seringues aseptisées et dans des draps qui sentent bon, c'est mourir quand même.

Un problème qu'on ne voit pas demeure un problème. Les média ne devraient jamais l'oublier lorsqu'ils citent comme étant des modèles merveilleux, certaines expériences d'autres villes ou pays, qui fournissent les seringues stérilisées et les locaux aux personnes en marche vers leur mort, qui s'injectent des drogues. Tant mieux si cette ouverture contribue à réduire la propagation de certaines MTS potentiellement mortelles comme le VIH-SIDA (est-ce un fait prouvé ?), MAIS la personne concernée est en train de mourir. Cela, il ne faut jamais l'oublier.

6) L'argument du "bon citoyen responsable"

Un des arguments des plus intéressants en faveur de la légalisation des drogues est celui du bon citoyen responsable. Il faut cesser, dit-on, d'infantiliser la population et laisser les gens décider de ce qu'ils font avec leur argent, leur corps, leur vie et leur santé. Cela ne regarde qu'eux-mêmes.

La faiblesse de cet argument se prouve dès que surviennent les problèmes liés à une vie sans contrainte externe. Il faut bientôt payer pour protéger les gens contre eux-mêmes (garde à vue à l'hôpital pour prévenir un suicide), leur fournir des seringues et condoms gratuits, des services professionnels gratuits, des drogues transitoires gratuites lors des cures de désintoxication gratuites, des médicaments gratuits pour les maladies graves liées à l'injection des drogues jumelée aux comportements sexuels à risque, des soins gratuits pour les cancers de la gorge ou pour se relever d'un accident de la route avec facultés affaiblies par la drogue et l'alcool, ou pour les soins ou compensation des victimes innocentes de ces accidents, et ainsi de suite.

Dans les faits, plusieurs réclament le droit de vivre sur le fil du rasoir, mais à condition que l'État (lire : l'ensemble des contribuables, la plupart de la classe moyenne) défraie le coût des conséquences possibles ou réelles de leurs choix individuels.

On doit selon eux, payer collectivement pour les conséquences d'une vie à haut risque. Voilà la grande faiblesse de l'argument du peuple mature et "responsable". Pouvez-vous imaginer un pilote de F1 qui exigerait que la classe moyenne couvre ses frais d'assurances vie et accident ?

"No fault" no more

Une liberté détachée des conséquences des choix et actions est une pseudo-liberté sans maturité. C'est le meilleur moyen pour provoquer la disparition des filets sociaux comme la pratique du "no fault" au Québec.

Je dois vous avouer que face à l'éventualité de la libéralisation des drogues qui se dessine, je deviendrai probablement en faveur d'une responsabilisation plus grande des consommateurs et de ce fait, de la disparition au mois partielle, du système du "no fault" sur nos routes.

Au Québec, un individu peut provoquer un accident de la route (ex. par distraction) causant des blessures à autrui, sans pour autant hypothéquer le reste de sa vie pour une erreur. C'est l'État qui collecte, gère et redistribue l'argent des assurances prélevées auprès des usagers de la route, tandis que l'aspect matériel est couvert par une assurance privée contractée par le conducteur. Ainsi, nous ne vivons pas dans une culture de poursuites devant les tribunaux. C'est un avantage du "no fault".

Mais la pression actuelle pour la légalisation des drogues amène à reconsidérer cet acquis. Une distinction devrait logiquement être faite entre une erreur due à une inattention de quelques secondes (ex. ne pas avoir vu venir un véhicule; ex. avoir dévié de sa trajectoire en regardant la console), et une négligence notoire de plusieurs minutes, comme la décision de conduire un véhicule avec des facultés affaiblies par l'alcool ou les drogues.

Les limites de l'argumentation du légaliser-tout

Il n'est tout simplement plus vrai que la version légale d'une activité empêche sa version illégale (underground). 

La légalité n'annule généralement pas la criminalité

Prenons par exemple ces activités déjà permises :

  • Les cigarettes légales pour lesquelles on a vu se développer un marché de contrebande sans taxes important.
  • La pornographie, pourtant en vente libre vs la pédophilie et d'autres abus, voir même des agressions filmées et revendus en ligne sur le web. La légalisation de la pornographie n'a pas éliminé le marché plus néfaste encore, ni les agressions sexuelles. 
  • Les produits pharmaceutiques déjà en vente libre sous prescription médicale n'ont pas empêché la copie illégale, ni le faux, ou mi-vrai, mi-faux à demi-prix. 
  • Et en matière de copie illégale, on peut citer n'importe quel oeuvre numérique (musique, films) ou article en vente libre, du petit appareil électronique ou accessoire électrique (souvent non conformes ou non sécuritaires pouvant provoquer des incendies) jusqu'à la chaussure et aux vêtements, en passant par les articles de sport et le reste. 
Cela fonctionne parce qu'il y a de la demande pour épargner les taxes, les droits d'auteurs, etc. De la même manière, la criminalité, la fraude et leurs variantes industrielles ne trouveront pas leur échec dans le fait de légaliser tout ce qui ne peut pas être contrôlé. Légalisera-t-on la copie illégale de chaussures de sport ? Ou la pédophilie via l'abaissement du consentement sexuel à 12 ou 13 ans? Les armes à feu personnelles dans chaque foyer?

Dans les faits, la relative réussite de la fin de la prohibition de l'alcool semble donc bien plus l'exception que la règle.

Maïs ou cannabis ? Hausse prévisible des prix des produits de la terre ($)

Qu'est-il arrivé quand on a commencé à utiliser du maïs pour produire du combustible (éthanol)? Il en est résulté une hausse du prix du maïs de consommation humaine pour les populations jusque là productrices (ex. Mexique). Dans un contexte où il risque d'être plus payant de produire des cultures servant aux drogues que les produits agricoles qui servent à nourrir les populations, il faut très peu d'imagination pour anticiper une suite semblable.

Il faudrait un certain côté immoral pour être prêt à assumer ceci pour la production de drogues à des fins ludiques, dans un monde où une partie importante de la population meurt de faim ou des maladies reliées à la sous-alimentation.

Comment un jeune paierait-il sa consommation régulière?

Dans une discussion sur le sujet avec un père de famille, celui-ci me servait le même genre d'arguments en faveur de la libéralisation des drogues que ceux énumérés. Je lui demandai alors: «Et comment un jeune va-t-il payer sa consommation hebdomadaire? Comment va-t-il payer, par exemple, son 50 dollars par semaine?» Son visage changea radicalement et il pâlit, au point de me mettre mal à l'aise (je ne voulais vraiment pas l'offusquer).

Imaginez, quand un jeune a déjà du mal à gérer son compte de téléphone portable, et que papa et maman doivent compenser son dépassement de 100 $ par mois... Un consommateur de drogues semblable, risque fort de verser dans l'illégalité, comme le vol ou la vente illégale de drogues, pour payer sa consommation personnelle, d'autant plus que cette consommation est souvent croisée avec d'autres comme l'alcool et la cigarette.

Verra-t-on ainsi le jour où les jeunes n'iront plus en prison ou en Centre de protection de la jeunesse, pour possession et consommation de drogues, mais pour vol de plants de cannabis dans un champ cultivé légalement?

Consommation croisée avec d'autres produits et risques accrus

ET il ne faut pas oublier cet autre élément important de l'équation : la consommation des drogues est souvent croisée avec d'autres consommations comme la cigarette et, plus risqué encore, avec l'usage de médicaments sur ordonnance médicale (ex. antidépresseurs) ou l'alcool.

CONCLUSION

Le monde criminel ne suit pas la logique du bon "peuple responsable". Il fonctionne selon un mode centré sur le soi et le profit très rapide. Il s'agit en fait d'une dysfonction sociale, dont l'ordre de mission n'est pas le bien-être des individus et des communautés, mais leur aliénation et leur exploitation frauduleuse, tantôt sur la base de besoins véritables, tantôt de dépendances nourries ou créées avec seul but de les exploiter.

Ne soyons pas naïfs. La disparition d'un moyen facile de faire de l'argent rapidement crée la demande et l'offre pour une pratique criminelle de remplacement. La criminalité ne s'effacera pas en éliminant les lois.

Pensée : La véritable liberté ne se réduit pas à choisir son esclavage.