samedi 8 octobre 2011

Hydro-Québec et compteurs-miracles, ça tourne pas rond

8 OCTOBRE 2011. Ayant consulté le site web syndical des employés d'Hydro Québec (1), je n'ai pas été convaincu du complot des compteurs de consommation d'électricité véhiculé dans le contenu des publicités syndicales abondantes à la télévision. Cela me semblait plutôt des affirmations pamphlétaires. Mais voilà, on commence à apprendre de moins bonnes choses sur un projet de remplacement de 3,75 millions d'unités de compteurs qui présentait les caractéristiques d'une évolution techno et logique. Mais parmi le plus inquiétant et le non-dit pour les familles, se trouve le fait qu'avec la technologie, la possibilité de surfacturer légalement un jour les familles consommatrices d'électricité aux heures de pointe est à nos portes. Et ces compteurs représentent aussi un bavard dans votre maison, concernant vos habitudes aux 30 secondes près, ou votre présence au foyer, etc.

Autre texte: Compteurs et conteurs d'Hydro-Québec (3 déc. 2012)
Compteur de type résidentiel
Modèle destiné à la clientèle
résidentielle
(sans puissance facturée)
Crédits photo : Hydro Québec


La logique voudrait qu'on migre nos pratiques de consommation, au rythme de la technologie éprouvée, si elle est efficace (économiquement, "énergétiquement", environnementalement, etc.). L'idée de "compteurs intelligents" qui peuvent transmettre des données à distance peut donc sembler justifiée.

Comment prendre quelque chose de bon pour en faire quelque chose de mauvais?

Des informations révélées ou résumées par Pierre Couture du journal Le Soleil (2) sur ces super compteurs miracles ont de quoi refroidir nos ardeurs en faveur de l'exercice consistant à remplacer 3,75 millions d'exemplaires de nos vieux compteurs analogiques à roulette (disque). 

En bref, l'auteur compile ou souligne des faits plus ou moins connus.
  • Résultat de revérification de ses chiffres par Hydro-Québec :  les économies anticipées avec les nouveaux compteurs seraient revues à la baisse, passant de 300 millions de dollars à 172 M$; économie étalée sur 20 ans. Mais Hydro Québec répond par voie de communiqué que l'information est erronée (3).
  • Les nouveaux compteurs numériques ont une durée de vie de 15 ans, contre 25 ans pour les modèles analogiques. Une économie calculée sur 20 ans, déjà c'est étrange; à moins de posséder une assurance-vie pour compteur... :-)
  • Les micro-ondes émises par l'envoi d'information sont classées potentiellement cancérigènes selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS); information contredite par la Société d'État pour le type de compteur utilisé (4).
  • Un dépassement des coûts est appréhendé, car la compagnie privée qui a le mandat de mise en oeuvre de la réforme a déjà dépassé les coûts de contrats pour le nouveau système informatique d'Hydro Québec. La migration informatique qui devait coûter à l'origine 270 M$ en a coûté près du double, passant à 500 M$, certaines sources disent 600 M$. Bonne chance pour les économies avec les compteurs. 
  • Pierre Couture reprend aussi l'idée des liens potentiels entre contrats d'Hydro-Québec et milieu criminalisé. La livraison des compteurs expérimentaux aurait été été stockée dans les entrepôts d'entreprises en lien avec le crime organisé. 
«Et comme si ce n'était pas assez, on apprenait la semaine dernière par le journaliste Olivier Bourque de TVA que les nouveaux compteurs d'Hydro, qui doivent servir à un projet-pilote dans la région de Montréal, étaient entreposés dans un immeuble appartenant au clan Rizzuto, lié à la mafia montréalaise. Bref, un dossier décidément parti tout croche [...]» (5).
Comme disait le maire de la métropole entre deux chutes de viaducs routiers en tout ou en partie (réseau de transport de Transport Québec) , «Ça va très bien à Montréal!». Oui, mais pour qui!? Voilà comment un état et ses mandataires peuvent faire pour transformer une bonne idée en quelque chose de mauvais.

Légendes urbaines et réalité



Compteur de type Affaires
Modèle destiné à la clientèle
d'affaires, donc les segments
commercial, industriel,
institutionnel
Crédits photo : Hydro Québec
Évidemment, comme pour le débat sur la vaccination de populations entières, il n'est pas toujours facile de séparer le mythe ou les légendes urbaines de la réalité. Par exemple pour la question de l'intensité des ondes et leurs effets sur la santé humaine, Hydro-Québec répond sur son site web, que les compteurs résidentiels de nouvelle génération sont sécuritaires.


«Or, le niveau d'exposition d'une personne qui se tiendrait à un mètre d'un compteur de nouvelle génération est de 23 000 fois inférieur aux limites établies par Santé Canada», peut-on lire sur le site web de la Société d'État (6).
Les syndicats et journalistes des grands médias (des syndiqués) sont-ils de mauvaise foi? 

Hydro-Québec sous influence du milieu criminalisé?

Par contre, certaines choses semblent plus claires: Hydro-Québec pourrait être en train de sombrer dans le même piège que l'industrie de la construction publique: les liens douteux entre le crime organisé et l'État québécois et la surfacturation qui en découle inévitablement. La mafia apprend à apprivoiser notre social-démocratie et la démo-crasse en ressort. Voilà un beau nouveau mandat qui pourrait être accordé à M. Jacques Duchesneau.

Quelqu'un ment

Voilà donc tout un bras de fer qui oppose les syndiqués à la puissante entité qu'est Hydro-Québec. Mais face à de telles contradictions sur plusieurs points, il y a habituellement une partie qui ment plus que l'autre. L'avenir nous révélera laquelle des deux. Mais à ce moment-là, ce ne sera probablement plus qu'une guerre de communication, de chiffres et de statistiques et il sera tout autant difficile de faire la part des choses. Vive le Québec!

Sur les pertes d'emploi


Hydro-Québec avance une réduction à terme de 726 postes (7). C'est extrêmement précis, vu l'échelonnement du projet. Je ne sais pas si cela inclut des départs à la retraite. Les syndicats parlent de plus de 1000 emplois de terrain et administratifs.

La possibilité de surfacturer légalement les familles consommatrices d'électricité est à nos portes

Déjà, j'avais personnellement une première réticence, pour avoir été parmi les dirigeants d'un OSBL (organisme sans but lucratif) qui possède un édifice avec un tel compteur. C'est que ces compteurs pouvaient aussi permettre, si le fournisseur d'électricité en avait le mandat, de majorer la facturation des utilisateurs en fonction de la consommation la plus forte du mois durant quelques minutes (taux en $ par kwh déterminé par le maximum atteint, multiplié par le nombre de kwh).

Autrement dit, le taux de facturation peut, si l'État l'autorise, être déterminé par les plus haut peaks  de consommation (puissance) enregistrés au cours de la période administrative (ex. mois). Cela signifie que si cela devait être implanté éventuellement, on ne facturerait pas uniquement au volume de consommation, mais selon la demande maximale atteinte à un court moment précis. Le modèle résidentiel "sans puissance facturée" ne semble pas le permettre, mais une fois la migration faite qu'en sera-t-il dans un horizon du prochain cycle de remplacement de 15 ans, c'est-à-dire, une fois le nouvel intrus accepté? 

Ce qui m'agace ici, c'est que les périodes de pointes de consommation, pour les clients résidentiels que nous sommes, sont plus intenses chez les familles que chez les personnes vivant seules ou les couples sans enfants. Je ne dis pas que les personnes seules ou les couples sans enfants doivent payer l'électricité des familles. Je dis qu'une telle surfacturation qui détermine le taux du kilowattheure sur le "peak" ou maximum atteint, si c'est ce vers quoi le gouvernement lorgne pour le prochain cycle de changement (env. 15 ans) irait contre toute logique visant à augmenter la natalité. La méthode actuelle fait déjà bien le travail en vue de stimuler les bonnes habitudes :

Déjà, un calcul équitable est appliqué:  Tarif de base pour  par exemple les 30 premiers kWh (kilowattheures) par jour
+ Tarif majoré pour la consommation au-delà des premiers kWh
____________________________________________________
= Tarif total avant taxes

Nul besoin d'aller au-delà d'un tel incitatif à l'économie d'énergie pour les consommateurs.

C'est en période de pointe résidentielle qu'on prend ou prépare les repas, consomme de l'eau chaude, etc. C'est aussi le matin vers 4 ou 5 h, que la minuterie de plusieurs chauffe-moteurs envoie la sauce vers l'automobile à essence ou diesel pendant la période la plus froide de la nuit. C'est aussi pour plusieurs travailleurs, le matin que se prend la douche rapide. C'est à l'heure du lever qu'on augmente le niveau de chauffage. A-t'on le choix quand la température moyenne extérieure la nuit, demeure sous 0 degrés Celsius durant des mois au Québec? Et qu'en sera-t-il pour les recharges des voitures électriques branchables?

Dans un tel scénario plausible à moyen terme, consistant à surfacturer à un taux selon les peaks de consommation résidentielle, les familles avec plus d'enfants verraient la surfacturation en périodes de pointe les pénaliser davantage. Si notre gouvernement veut favoriser la natalité, voilà une belle occasion de quelque chose à NE PAS faire et à décréter en ce sens pour encadrer H-Q.

Un bavard dans votre maison


On a affirmé à HQ que les lectures fréquentes du nouveau compteur résidentiel ne visent pas à épier les comportements en vue d'autres usages non autorisés (ex. marketing ciblé, estimer le nombre de personnes au foyer en temps quasi-réel, etc.).

Pourtant, si le compteur émet des données toutes les 30 secondes, c'est donc que
  1. soit on veut déterminer le taux de facturation ($ par kwh) en fonction du peak atteint durant quelques minutes au peak (taux de facturation tenant compte de la consommation maximale du mois atteinte à un moment précis)
  2. soit on veut épier les comportements et habitudes dans la sphère privée
  3. soit on vise les deux options qui précèdent.
Sinon, pourquoi émettre des centaines de lecture par jour (une aux 30 secondes)?

En effet, ce type d'appareil non agressif pourrait épier vos habitudes de consommation (8). 

Surfacturation éventuelle des familles avec plus d'enfants

Ayez à l'œil le dossier durant la prochaine décennie. Quelle que soit l'issue du débat sur les compteurs, il ne faudra jamais perdre de vue qu'il faut faciliter la naissance et les familles en évitant de les surtaxer surfacturer les naissances. C'est à ce prix que l'on combattra le prétendu "vieillissement de la population" qui est en réalité une dénatalité avec 1,7 enfant par femme. Cette dénatalité a un lien direct avec le maintien de l'identité québécoise et de bons programmes sociaux (santé, éducation, régimes de retraite de l'État comme celui de la RRQ). Le problème en effet, n'est pas le vieillissement des individus, un processus naturel, mais le non-remplacement des aînés par des naissances. La solution économique ne passe donc pas dans l'euthanasie. Or, toute idée de facturation selon un taux ajusté à la période de plus forte consommation (peak) qui pénaliserait les familles avec plus d'enfants, va à l'encontre de favoriser les naissances.

Pourquoi  priver les Québécois de l'avantage d'une ressource nationale?

Les coûts de l'énergie électrique constituent l'un des domaines où le Gouvernement du Québec peut agir directement dans le contexte de ses politiques familiales, sans demander la permission, car Hydro-Québec est une Société d'État depuis la nationalisation de l'électricité. Encore faut-il conserver l'entière propriété légale de cette entreprise des investissements étrangers. On peut soupçonner toutefois que le gouvernement (le vrai qui survit aux élections) jonglerait avec l'idée de changer le mode de facturation dans la prochaine décennie pour renflouer ses coffres (une autre taxe détournée).

LIRE AUSSI : Compteurs et conteurs d'Hydro-Québec (3 déc. 2012)

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4. Hydro-Québec. Les radiofréquences et les compteurs de nouvelle génération. hydroquebec.com, consulté le 8 octobre 2011.

5.  Pierre COUTURE. Les compteurs de la colère. 5 octobre 2011.

6.  Hydro-Québec. Les radiofréquences et les compteurs de nouvelle génération. consulté le 8 octobre 2011.

7.  Hydro-Québec. Réplique d'Hydro-Québec à l'article publié le 5 octobre dans Le Soleil par Pierre Couture et titré Les compteurs de la colère. 5 octobre 2011.

8.  Une personne additionnelle se trouvait-elle chez vous entre telle date et telle date? Étiez-vous absents de votre foyer durant 2 semaines ciblées de janvier? Des criminels avec des "connexions" (amis) à la Société d'État pourraient obtenir des informations privilégiées comme : identifier par requête dans les bases de données, des adresses consécutives (voisines l'une de l'autre) dans une rue, où les compteurs tournent au ralenti depuis trois jours et où il serait intéressant de faire des visites nocturnes en vue de vol (donc, maisons avec des absents -compteurs au ralenti depuis 2 ou 3 jours- et où il n'y a pas de voisins présents).