vendredi 6 janvier 2012

Mon dernier "parler" du Bye Bye 2011: MILITANTISME ET "MODÈLE" QUÉBÉCOIS

Je ne voulais plus parler du Bye Bye 2011, mais c'est le Bye Bye qui voulait que je parle de lui.
(Modifié le 7 janvier 2011)

Ce matin du 5 janvier 2012, suite à une entrevue au FM93,3 de Québec avec Mathieu Bock-Côté, une animatrice du matin suggérait que puisque ça va si mal économiquement (mises à pied massives de travailleurs et fermetures d'entreprises, régimes de retraite, déficits, dette nationale, etc.) et en divers domaines socio-politiques (printemps arabe changé en "congélation"), que finalement, c'est peut-être secondaire de parler du Bye Bye (revue humoristique de l'année 2011 par la SRC). Le problème cependant, c'est qu'il n'est pas secondaire de parler du Bye Bye dans la mesure où les problèmes économiques proviennent en bonne partie des politiques de surendettement où nous a conduit notre social-démocratie des près de 50 dernières années. Non pas que la social-démocratie soit plus mauvaise qu'un autre système, mais plutôt qu'on s'est donné des systèmes et services, soit au-dessus de nos moyens, soit trop gros pour être gérés et optimisés facilement. Plus le navire est gros et va vite, plus c'est difficile de le faire dévier ou ralentir.
Soit
1) notre élite était bonne en lettres et en philo, mais nulle en chiffres (ce que je ne crois pas; c'était un prix calculé),
2) soit on verrait plus tard, une fois le Québec épuré de ses valeurs et influences jugées indésirables; ceci demandant 1 ou 2 générations. Le Premier ministre René Lévesque avait fait un premier correctif en 1980, en coupant les salaires des fonctionnaires de 20 %, question d'éloigner la date  de l'éveil. Ceci pouvait aussi permettre d'augmenter la taille de l'État tout en stabilisant la masse salariale pour les années suivantes.

Il faut donc parler des Bye Bye qui se succèdent, porteurs des mêmes lunettes et mêmes filtres idéologiques

Le modèle social-démocrate québécois, c'est comme si nous avions les moyens pour une Toyota Yaris ou une Kia Rio, mais que nous nous sommes payés une Audi R8. C'est comme un père divorcé qui pour attirer son ado et en obtenir la garde légale, lui donne une motoneige, un QuadRunner (véhicule quatre roues tout-terrain appelé au Québec VTT), un vélo trial de 5,000 dollars, une carte de membre du club de golf, une autre du centre de ski, lui paie des vacances à l'étranger, etc., mais sans en avoir les moyens. Il "load" deux cartes de crédit de 15,000 dollars chacune, remplit sa marge de crédit personnelle et s'endette à ces fins. Il retarde bientôt les paiements de l'hypothèque de sa maison et des taxes foncières et scolaires. Mais comme le dit une phrase avec humour : «C'est quand la mer se retire qu'on voit ceux qui se baignent nus

Par exemple, avait-on les moyens de subventionner le non-emploi en supportant des gens qui ne veulent ni travailler ni se former pour ce faire, mais qui en ont la capacité et qui à 18 ans deviennent assistés sociaux par choix (je parle de ceux qui NE veulent PAS travailler, ni se former)? Cela encourage le désordre et la désolidarisation. Pourtant, notre système le supporte fort bien. Avions-nous les moyens d'empêcher un partenariat élargi du système de santé avec le privé, en refusant à ceux qui en avaient les moyens, d'accéder à un système dont ils assumeraient une bonne partie des coûts, tout en continuant de supporter l'autre et donc, sans que le système public des soins de santé ne soit pour autant enlevé (les plus aisés y contribuant malgré tout)? 

L'endettement massif depuis les décennies 1960 et 1970 était en bonne partie prévu et avait un but

Vous voulez un secret: l'endettement massif a été probablement le moyen (le coût calculé) pour sortir le clergé, presque d'un seul coup, des programmes sociaux majeurs comme l'éducation et la santé. Le Rapport Parent (sections publiées entre 1963-1964) stipule qu'il faut une refonte complète de l'éducation et séparer religion et État, mais était-ce le moyen et le coût juste de le faire, c'est-à-dire en surendettant les générations suivantes. Il faut considérer que si les communautés religieuses avaient des édifices ressemblant à des domaines, elles y demeuraient et travaillaient par plusieurs dizaines de personnes (services mis en commun). Ce n'étaient pas 50 ou 100 condos avec chacun leur cuisine, salle de bain, etc., mais un édifice communautaire avec des chambres. A-t-on volontairement fermé les yeux sur le fait que les communautés religieuses (ici majoritairement catholiques) vivaient généralement de peu, sans salaire individuel, dans de grandes résidences communautaires, un chalet ou maison de repos pour plusieurs dizaines ou une centaine, un véhicule automobile partagé, etc., donc avec des coûts minimaux. Mais ceux qui les ont remplacés, fin décennie 1960, puis 1970 et suivantes, ont été syndiqués et ne vivaient pas en communauté. Ils ont acheté une maison entourée de gazon, ont eu des enfants, une auto, un chien nourri au Dr Ballard (marque déposée), parfois même une résidence secondaire familiale et plus encore. Les effets économiques de la main mise totale de l'État sur les services éducatifs et de santé (et certains services sociaux) était facile à prévoir, sans aucun calcul poussé ni doctorat en administration: impossible de se donner les services anticipés aux mêmes coûts que le permettait les communautés religieuses remplacées par des revenus pour familles de classe moyenne et supérieure. Les conséquences et les coûts pour sortir le clergé du système social étaient prévisibles au départ, bien que non connus avec précision. Mais il semble qu'on ait conclu, dans la social-démocratie version Québec de la "révolution tranquille", que c'était là un prix à payer. On renflouerait le crédit plus tard. Sauf que ces dernières années, on a atteint le bout de l'élastique et on ne peut abolir une loi naturelle. L'élastique a deux choix naturels: se rompre ou se détendre (revenir).

La question : faut-il freiner en catastrophe ou appliquer les freins fermement et progressivement? Car il semble que l'humain n'ait pas le système de freinage assisté électroniquement. Bien-sûr, comme toute analogie, celle-ci a ses limites, mais comme toute analogie, c'est aussi pour mieux comprendre. Un freinage en mode panique engendrerait l'instabilité et servirait la cause des partis ou groupes de tout acabit avec une solution miracle et facile; de types néo-anarchistes, ultra-socialistes, communistes ou marxistes et le reste.

Bref, ce serait le désordre social, non pas uniquement au sens de la casse de la rue (le party et l'ivresse du renversement et de la destruction ne durent qu'un temps), mais au sens d'un héritage caractérisé par le désordre structurel et viscéral. Ce serait leur servir le Québec sur un plateau d'argent à des idéologies socio-politiques qui ont déjà échoué au 20e siècle, là où elles ont été appliquées dans le monde.

À l'inverse, la situation ne justifie pas que l'on privatise toute activité de l'État qui fait ses frais et dégage en plus des surplus ou avantages retournés à l'État, par exemple en maintenant des services à un coût moindre (ex. Hydro-Québec et son électricité à prix abordable). On peut d'abord commencer par rationaliser les dépenses, mais en ayant le cran de revoir les services pour éliminer ce qui n'est pas si important ou est déjà desservi ou peut l'être par le privé. Et on peut rendre au privé, ce qui va au privé. Par exemple, est-ce à l'État, en 2012, d'avoir le quasi-monopole de la vente de l'alcool en dehors de la bière? Est-ce à l'État de promouvoir l'illusion de richesse par les loteries et jeux d'argent, pour maintenir ce "modèle québécois" qui craque de partout?

Ce n'est pas que nous n'ayons "plus les moyens" de notre modèle; nous ne les avons jamais eus

Il faut donc parler des Bye Bye qui se succèdent, porteurs des mêmes lunettes et mêmes filtres idéologiques, parce qu'ils continuent de faire une promotion politique activiste de la version actuelle de cette social-démocratie pour laquelle nous n'avons jamais vraiment eu les moyens, parce que nous avons pris une version haut-de-gamme, plutôt qu'un système de base ou intermédiaire.
Et c'est normal, pour les courtisans (ici les artistes étatisés ou soutenus par le roi) de défendre le système qui les entretient. Avons-nous les moyens de continuer de supporter des spectacles gratuits (je ne parle pas ici du Bye Bye) à grand déploiement à chaque saison et festival? Avons-nous les moyens de supporter tout art, ou tout artiste pour l'entière durée de sa vie productive, même lorsque son art ne trouve aucun preneur ni aucun marché, tandis que des diplômés de biologie, d'histoire, de foresterie, d'anthropologie, d'aménagement du territoire, de journalisme, de communications et d'autres programmes encore, ont dû se recycler ou trouver une autre occupation ou même lancer une entreprise (aide gouvernementale cette fois limitée dans le temps)? Avons-nous les moyens de garantir un revenu mensuel garanti à ceux qui sont en bonne santé (les «sans contrainte» au travail) et ne veulent ni se former, ni travailler ou qui cumulent soutien de l'État et travail non déclaré?

La politique, un incontournable d'une revue de l'année comme le Bye Bye

Le problème, et j'affirme mon désaccord avec ce qui a été dit sur le poids du contenu politique du Bye Bye 2011, ce n'est PAS qu'il y a trop de politique dans sa dernière livraison. Le Bye Bye est une revue de l'année qui, par une forme de tradition ayant à peu près l'âge de notre modèle actuel de social-démocratie, se veut humoristique et artistique. Évidemment, il est normal que la politique en occupe une part significative puisque celle-ci a un poids médiatique et réel important dans notre société québécoise et canadienne. L'année 2011 a été mouvementée au Québec et au Canada sous cet aspect: Le Bloc Québécois qui fond comme bloc de glace au printemps (2 mai), les tentatives et rumeurs de putsch contre Pauline Marois du PQ, les scandales de la collusion et corruption présumées aux travaux des transports, la saga du financement de l'amphithéâtre de Québec et la loi spéciale de la fin de l'été pour encadrer les manifestations tous azimuts, les infrastructures des autoroutes de Montréal qui meurent avant leur temps, semble-t-il faute de surveillance adéquate lors de leur construction, etc.

Le vrai problème du Bye Bye, cette revue en humour de l'année des Québécois

Mais le problème du Bye Bye dans notre contexte socio-politique, c'est que l'exercice annuel continue année après année, d'élever et promouvoir un système qui nous coûte plus cher que ce que nous avons eu les moyens de payer. Il faut selon leur point de vue, choisir entre les banques ou les gens qui dorment dans la rue; rien entre les deux. Vous êtes avec nous ou contre nous, attitude "pour ou contre nous, il faut choisir", qui a pourtant reproché à W., dans le contexte de la guerre contre al-Qaïda.  Bientôt, la classe moyenne sera taxée et imposée à plus de 50% de son revenu comme cela est déjà le cas en divers pays. Et si cela s'avère, il y aura lentement mais sûrement, disparition de la classe moyenne. Et il y en a qui prétendent dormir dans la rue et ont un emploi sous la table, une tuque à 35$, des chaussures de 150$, un ordinateur portable, un iphone, et plus.

«On fonce dans le mur»; oui mais lequel?

Le problème, c'est aussi dans la définition qu'on donne au "mur" vers lequel notre social-démocratie est en train de foncer. Les divers clans politisés parlent du "mur" mais sa définition est variable, même opposable. Il reçoit en fait des définitions diamétralement opposées.

  • Pour l'artiste des médias, "le mur" vers lequel on s'en va, c'est une restriction et optimisation des dépenses dans les services sociaux et la "culture". Le mot culture ne veut plus dire ici, culture au sens plus large de la totalité de ce qui fait un peuple, mais l'équation simpliste culture=arts. L'hérésie serait donc de freiner les dépenses en coupant là aussi. Comme si les arts constituaient une nouvelle institution intouchable. Oui il y a des arts supportés par l'État, même dans les dictatures de ce monde, mais ce sont des arts d'élite, pour les meilleurs. C'est du calibre "olympique". On craint que repenser le financement des arts au Canada, ce serait tuer le fait français. Peut-être que pour ne pas tuer le fait français, il faudrait donner l'exemple aux jeunes, sur comment on peut aligner dix phrases bien structurées, sans un juron ou mots qui remplissent les vides du discours ("genre"). Pire encore avec l'écriture. Que la télévision d'État (SRC) montre, justement, comment on peut parler correctement un français correct au Québec et du Québec. Le "mur", selon cette définition, ce serait aussi cesser de supporter financièrement les personnes qui ne veulent ni travailler, ni se former mais qui en ont la capacité (ex. capable de faire au moins des tâches manuelles); je veux dire, l'aide sociale automatique à l'entrée à l'âge adulte (18 ans au Québec). Ce serait une injustice totale selon eux.
  • Pour l'autre partie, "le mur" c'est plutôt l'iceberg de l'endettement et des déficits, droit devant le Titanic version Québec, tandis que l'orchestre s'éclate avec les convives (population québécoise) et pendant que le capitaine  (politiciens) fait chauffer au maximum les chaudières du paquebot, parce qu'il veut laisser sa marque dans l'histoire, en battant un record de performance entre Southampton (Angleterre) et New York (Le Québec toujours en quête d'être un modèle mondial de système; la référence). Il faut être une référence, que dire! le meilleur, le premier, le modèle mondial, etc. On entend cela régulièrement à divers paliers de gouvernements. Mais cette vision de l'iceberg, prône malheureusement le fauchage de tout ce qui ressemble à une implication de l'État en dehors de la gouvernance politique (ex. privatisation massive de sociétés -régies- utiles et rentables comme Hydro-Québec); soit encore donner nos ressources auxquelles nous et nos parents avons contribué par nos impôts et taxes. La rationalisation des dépenses et la reconsidération de nos besoins sociaux essentiels semblent écrits dans le ciel économique, mais la façon de faire fait peur. On peut y perdre beaucoup, d'autant plus que les milieux financiers ne sont pas plus blancs que blanc.
Comment freiner les dépenses sans se faire esclave des grands financiers occultes (mystérieux)?

Mais si le couperet semble inévitable, la façon de le faire a de quoi faire peur, comme une visite chez le dentiste lorsqu'on a un abcès sous une molaire. C'est qu'il ne faut pas négliger les pouvoirs économiques souvent inéquitables dont nous ne devons pas devenir esclaves et auxquels nous ne devons pas vendre nos pays, terrain par terrain, entreprise par entreprise, par exemple à la Chine et aux autres; ceux qui ont les moyens de porter des costards italiens et de décréter la mort du vrai pauvre, celui qui voudrait travailler, mais ne le peut pas ou ne le peut plus. Car si nous vendons le pays, terrain  par terrain, entreprise par entreprise, nous ne serons bientôt plus souverains sur notre territoire. Il y a une partie incontestable de malsain ou machiavélique, un dogme questionnable, dans l'économie mondiale qui centralise de façon croissante les pouvoirs à l'extérieur de nos pays. Réveillons-nous!

L'orientation socio-politique du Bye-Bye oblige d'en parler

Mais oui, en raison de la lecture unilatérale de tendance socialiste ou marxiste qui domine depuis des années, il faut parler du Bye Bye. Ils le comprendraient, si on inversait la tendance et que, pendant ne serait-ce que 5 éditions annuelles, le Bye Bye se mettait à soutenir nettement la droite économique, la privatisation sans réfléchir sur les réels avantages, etc. Dans les faits, une Société d'État qui fait une pareille revue de l'année avec l'argent de tous, de droite, centre et gauche, devrait être plus balancée politiquement.

Enfin ce soir (5 janvier 2012), j'ouvre un journal et je lis des mots qui font remonter en moi le désir d'écrire ce billet. Je reprends donc cette pensée satirique de Stéphane Laporte:
«Il n'y a pas trop de politique dans le Bye Bye, il y a trop de Bye Bye, dans la politique.» (1)

C'est exactement cela en une seule phrase. Qui sort le grand gagnant de ce combat médiatique de la période des Fêtes (de Noël aux Rois)? C'est une gagnante. Son nom est  Julie Snyder qui s'est invitée à servir le champagne à la station reine, Radio-Canada / CBC, à l'émission vedette Tout le monde en parle (version retour sur 2011). Ça c'est faire preuve de culture, démontrer de l'amitié et du respect envers ses compétiteurs et se rendre serviteur des autres sans ouvrir la bouche. Personne ne peut vaincre la "royauté" de cette entité qu'est la SRC / CBC et de sa cour (ses courtisans) qui ingurgitent maintenant 1,1 milliard de dollars ($) en impôts et taxes des contribuables canadiens annuellement (chiffres de 2009-2010).

Un dernier questionnement, tel que publié le 4 janvier: Une question contractuelle (droit corporatif)

Il reste une chose à clarifier suite à la saga des refus d'entrevues en décembre ciblant les médias en compétition avec Radio-Canada. Les producteurs de semblables émissions annuelles de divertissement à la SRC, sont-ils des producteurs indépendants qui livrent un produit clés en main, ou des employés de la Société d'État? Parce que s'ils sont producteurs indépendants, cela n'impliquerait-il pas des appels d'offres? Et s'ils sont des employés de l'État pour un mandat précis, ont-ils le droit de refuser de répondre aux questions?

Autres textes : 

Bye Bye 2011; mon billet le moins essentiel

Égypte : les rapports sur la situation se contredisent ÉGYPTE ET MANQUE D'INFORMATION : OÙ EST LA SRC (CBC)?

_______________
1.  Stéphane Laporte, Mon clin d'œil, Le Soleil, jeudi 5 janvier 2012, p. 23.