samedi 14 mai 2016

UBER et la courte vue du Québec

Mai 2016 - OU: LE PROJET DE LOI 100; avec «100» comme dans «100» génie...

Le Québec a mal à ses monopoles. Plusieurs jeunes de divers arrières-plans sociaux et politiques du Québec ont très mal pris le projet de Loi 100 qui devait être sur l'industrie du taxi, mais qui est dans les faits, non pas un projet de loi évolué, mais une législation anti-UBER et anti nouvelles entreprises. Plusieurs libéraux du Québec (PLQ) ne se reconnaissent pas dans ce brouillon sans nuance et déconnecté de la nouvelle réalité.


C'est le cas notamment de la Commission-Jeunesse du Parti libéral du Québec (PLQ). Le ministre des Transports qui pensait représenter la modernité avec son projet de loi musclé anti-UBER s'est fait rabroué samedi le 14 mai 2016, non seulement par son aile jeunesse, mais aussi par sa base militante.

Plus tôt en semaine, la médaillée olympique en patinage artistique, Joannie Rochette, y était allée d'un tweet acidulé en réponse à la proclamation de victoire des taxi trad, avec le projet de Loi 100 sur l'industrie du taxi, le fruit surtout des pressions de Montréal:




La loi musclée contre UBER fera qu'une part non négligeable de la population se retournera contre ce socialisme émergent (1) de nos gouvernements successifs et contre le monopole des chauffeurs de taxi. Déjà, sur les réseaux sociaux, les utilisateurs frustrés suggèrent de ne plus donner de pourboires aux chauffeurs de taxi, en guise de protestation et de s'en tenir au prix affiché. Un moyen tout à fait légal.

Ce sera difficile d'avoir sa monnaie car il n'est pas rare, semble-t-il que certains chauffeurs «manquent de monnaie». Avouons que c'est un bon truc pour forcer la générosité des clients ;-)


UBER taxi, objet d'un fort débat au Québec en mai 2016, particulièrement avec le projet de loi 100 sur l'industrie du TAXI; «100» comme dans «sans» génie.

Mon article préféré sur le sujet est celui de Alain DUBUC, publié dans La PRESSE+ (14 mai 2016) sous le titre « Uber était un test; le Québec l'a raté »


La part des choses

  • Il faut quand même avouer que le modèle d'affaire UBER tel qu'implanté ailleurs ressemble par moment à une économie souterraine comme celle qui a amené les sérieux problèmes économiques de la Grèce. Selon plusieurs économistes, les problèmes de manque de fonds publics provenaient en partie d'une économie souterraine importante (impôts et taxes non payées par les contribuables).
  • Et réduire UBER à un gadget technologique sur un téléphone intelligent est une exagération que poussent plusieurs utilisateurs branchés. UBER n'est pas du covoiturage, mais un véritable service de transport et a un réel pouvoir de nuire à l'industrie du taxi et aux autres transporteurs dûment enregistrés payant tous les droits de leur secteur d'activité.
  • De plus, la sécurité du public étant importante, il est normal de vouloir s'assurer des qualifications des conducteurs d' UBER.
  • Financièrement, un gouvernement peut vouloir s'assurer que les conducteurs d' UBER prélèvent des taxes sur un service commercial.

Par contre, la réponse du Québec via son projet de loi contre le libre-marché est nettement exagérée


  • Par exemple, qui a dit que l''industrie du taxi ne doit pas être mise en compétition?
  • Ou encore, que le taxi doit être un emploi à temps plein pour tous et  non un moyen de faire un revenu d'appoint pour ceux qui en font le choix?
  • Ou encore qu'il faudrait jusqu'à l'extinction de notre astre solaire, investir une fortune en permis pour opérer un taxi?
  • Rien de tout ceci ne doit obligatoirement rester figé jusqu'à la fin des temps.


Les PLUS de l'approche UBER


La formule proposée n'a pas que des défauts. Elle présente certains avantages à une clientèle-cible

UBER met en relation des partenaires membres et des clients qui recherchent une expérience de taxi différente.

  • Mettre plus d'offre de transport à toute heure et pour un coût souvent moindre que le taxi traditionnel.
  • Mettre à profit les innovations technologiques en utilisant les particularités d'une génération branchée (réserver et voir la position du véhicule UBER en plus de l'identité du conducteur, via une application sur son mobile - téléphone intelligent...). Le taxi traditionnel disait que c'était déjà dans ses plans, mais rien ne bougeait jusqu'à ce que la nouvelle formule débarque. 
  • Donc, UBER favorise en plus l'évolution du taxi traditionnel en le forçant à tenir compte des besoins changeants des clients; approche-client non priorisée quand on détient un monopole du taxi.
  • Ne demande pas de subvention au Ministère des Transports, contrairement aux taxis conventionnels. Ceci probablement parce que ses conducteurs ne sont pas obligatoirement dédiés à temps plein, ni à ce revenu unique. 
  • Donc, un revenu régulier ou revenu d'appoint à un travailleur local participant. Car, si d'une part UBER n'est pas né au Québec, par contre, les conducteurs sont des gens de la communauté urbaine. La formule contribue donc à l'emploi local autonome (propriétaire conducteur).
  • Une offre de services dérivés (ex. transport local dans un court délai, de produits commandés ou expédiés). 
  • UBER facilite, via sa disponibilité, le recours au transport sécuritaire par exemple après la consommation d'alcool.
Bref, UBER crée un revenu principal ou d'appoint, au choix, à des travailleurs, en ralliant une clientèle, laquelle n'aurait probablement pas pris un taxi conventionnel plus dispendieux et moins disponible en périodes de pointe ou à certaines heures.

Les moins d' UBER


Mais le modèle a aussi des travers:
  • Absence de formation de conducteur dans la version initialement proposée; très facile à exiger et à adapter. La sécurité du public est primordiale. UBER est d'ailleurs prêt à se conformer à ces exigences du Québec.
  • Travailleurs autonomes? Par que... Le concept Uber est aussi une multinationale multimilliardaire, comme des réseaux sociaux connus.
  • Un prix variable en fonction de la demande (heure, période de l'année, etc.) est-il éthique? Sinon, il semble que l'industrie du taxi trouve l'idée géniale et veuille récupérer le concept dans le nouveau projet de loi. Il y a des limites à la surfacturation «légale» en période de pointe (ex. saison des Fêtes au Québec, avant Noël jusqu'au Jour de l'An). On a tous entendu parler de courses à un prix exorbitant chez UBER. Sauf que ces cas ont contribué à rappeler à l'ordre les membres de la bannière. Une réglementation simplifiée pourrait établir que le conducteur ne puisse pas exiger, par exemple, plus du double de la tarification habituelle et rendre obligatoire l'affichage du prix de la course dans le véhicule. Il faut souligner que le prix normal d' UBER est plus bas que celui du taxi conventionnel et qu'il n'est pas subventionné.
  • Absence de permis. Oui mais, quand les permis en viennent à servir à la spéculation, comme pour les garderies, le but est détourné. Pourquoi un permis doit-il coûter 100,000 ou près de 200,000 dollars en 2016 au Québec. UBER gagne dans l'opinion populaire ici. Les permis d'exploiteurs fort coûteux ont une odeur de frime du même genre que celles qui ont donné naissance à la commission Charbonneau (auditions et enquête visant l'industrie de la Construction publique) ou de l' UPAC (unité permanente anticorruption).
  • On reproche à UBER (les exploitants) de contribuer à une économie souterraine qui ne charge pas les taxes, mais UBER s'est dit ouvert à prélever les taxes. 
  • D'autre part, les taxis conventionnels n'avaient pas encore le paiement automatisé en 2015... Donc, pour la morale, on repassera. Il est tout aussi facile de frauder quand on exige le paiement comptant dans un taxi conventionnel. En 2010, j'ai eu recours à un taxi dans le secteur de Charlesbourg à Québec, mais au téléphone on répondait que le paiement automatisé (crédit ou débit) n'était «pas encore» disponible. J'étais stupéfait.  Je devais marcher jusqu'à une institution banquaire pour y faire un retrait pour les services d'un taxi. Allo innovation et service au client! Cinq ans plus tard, le taxi était au point mort sur le même sujet.

Perception populaire d'une industrie du taxi conventionnel figée et non à l'écoute des clients


Absence d'uniformité; quel numéro de téléphone en fonction de la partie de la ville où vous êtes à Québec? Une petite recherche Google pour appeler un taxi de la bonne juridiction à Québec vous convainc rapidement de la complexité de trouver un taxi. On est loin du côté pratique des célèbres taxis jaunes. Quand j'appelle un taxi en 2016, je ne veux pas avoir à me demander sous la juridiction de quel territoire je suis (anciennes villes avant les fusions municipales de 2002!); d'autant plus si je suis de passage à Québec.

Une industrie en situation de monopole devient une industrie figée


Quand une industrie détient un monopole, elle devient vite autosuffisante et non à l'écoute de la clientèle. C'est pareil en divers domaines des communications au lait, en passant par l'agriculture en général. Le Québec peine toujours à se mettre en compétition. La loi musclée contre UBER se retournera contre le socialisme émergent de nos gouvernements successifs et contre les chauffeurs de taxi. Déjà, sur les réseaux sociaux, les utilisateurs en colère suggèrent de ne plus donner de pourboires aux chauffeurs de taxi, en guise de protestation et de s'en tenir au prix affiché.

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1.   Contrôle via les monopoles avec permis à prix exorbitants profitant à l'État; par exemple, les monopoles d'unions (agriculture, acériculture, taxis, services de garde des Centres de la petite enfance (CPE), via un système de pizzo légalisé, payé à l'État.